L'avenir de la fonction TI

Pour réussir, les organisations de TI devront suivre le rythme des innovations dans les entreprises et sur le marché. Par exemple, l’intelligence artificielle (IA) générative donne aux ingénieurs en logiciels les moyens de rédiger, de tester et de traduire rapidement des codes, ce qui accélère l’innovation. Toutefois, l’innovation ne repose pas entièrement sur la technologie, et les dirigeants du secteur devront rester extrêmement bien renseignés sur les besoins des entreprises.

Comment la fonction TI peut-elle innover à grande vitesse en agissant à titre de véritable partenaire pour la stratégie d’entreprise? Pour ce faire, il faut des principes Lean et des pratiques agiles dans l’ensemble des opérations de TI. Il peut s’agir de mesures aussi simples que de réunir au même endroit des utilisateurs appartenant à diverses disciplines pour leur permettre de résoudre des problèmes ensemble ou d’instaurer des mécanismes agiles officiels. Les directeurs des systèmes d’information peuvent commencer par réinventer leurs stratégies en matière d’IA en s’assurant d’adopter une approche d’exécution agile. Toutefois, ils doivent également créer une taxonomie normalisée pour assurer la coordination entre les entreprises et les organisations de TI, tout en faisant évoluer les modèles de financement existants.

Nous observons également une tendance vers les solutions consommées sous forme de service infonuagique, qui représente la deuxième grande transformation des plateformes. Ces solutions permettent aux organisations de bénéficier des technologies les plus récentes tout en réduisant les coûts initiaux. Selon notre rapport mondial sur la technologie de 2023, quatre entreprises sur cinq au Canada prévoient accroître leur utilisation de solutions « tout en tant que service » (XaaS) dans le cadre de leurs efforts de réduction des coûts au cours des deux prochaines années. Toutefois, une aversion pour le risque lié au XaaS subsiste, seulement 37 % des répondants canadiens affirmant que les possibilités qu’apporte le passage au XaaS l’emportent sur les risques, comparativement à 63 % à l’échelle mondiale. Si le XaaS peut apporter à la fonction TI une latitude considérable, il crée également une nouvelle façon de travailler qui comporte des défis.

Si la fonction TI n’offre plus la technologie qui sous-tend les modèles d’entreprise, les principales responsabilités des membres des équipes changeront. Le XaaS exigera également de réinventer le cyberespace et la résilience, par exemple en s’adaptant aux modèles à sécurité partagée et en gérant les coûts imprévisibles qui les accompagnent. Pour commencer, les directeurs des systèmes d’information doivent user de gouvernance pour gérer l’évolution vers le nuage informatique public, renforcer les relations avec les fournisseurs (et entre les entreprises) et commencer la transition vers un cadre de sécurité à vérification systématique dans l’ensemble de l’entreprise.

Alors qu’un nombre grandissant d’organisations canadiennes se tournent vers le XaaS, certains fournisseurs tiers prendront en charge des fonctions essentielles pour les missions. Toutefois, la fonction TI sera responsable de gérer les relations avec ces tiers et d’assurer la sécurité, la confidentialité et la conformité, des domaines qui lui apportent déjà des difficultés. Dans le cadre du rapport mondial sur la technologie de KPMG, 48 % des dirigeants canadiens du secteur ont déclaré que leur fonction TI ne disposait pas de la gouvernance et de la coordination nécessaires pour appuyer leurs initiatives de transformation numérique.

Pour passer à une approche de « résilience dès la conception », la fonction TI devra d’abord comprendre les interactions entre les divers partenaires et tiers ainsi que leur incidence sur les services et les applications essentiels. La stratégie pourrait comprendre plusieurs niveaux, notamment des capacités en matière de protection, de redondance et de récupération. Les directeurs des systèmes d’information peuvent commencer par s’attaquer aux barrières culturelles qui créent des risques (comme une faible sensibilisation ou un manque de connaissances), à la planification d’une feuille de route qui facilitera l’adaptation à la deuxième transformation des plateformes technologiques et à la démonstration de la valeur des investissements dans la résilience aux cadres supérieurs.

Plus de la moitié (51 %) des dirigeants canadiens du secteur de la technologie qui ont répondu à notre rapport mondial sur la technologie affirment que l’avancement des priorités liées aux enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) représentera un objectif d’innovation principal pour leur fonction TI au cours des deux prochaines années. Toutefois, les opérations responsables ne se limitent pas aux déclarations des entreprises à des fins de conformité. Il s’agit plutôt d’adopter des pratiques ESG afin de créer de la valeur pour l’organisation, de la gestion de la consommation d’énergie à la réduction des émissions de carbone, en passant par des pratiques d’approvisionnement responsables. L’adoption de pratiques ESG peut également aider les organisations qui se heurtent à des enjeux stratégiques, par exemple des pénuries d’approvisionnement et des ruptures de la chaîne de valeur.

Pour la fonction TI, la transition vers la durabilité commence par la résolution des défis liés aux enjeux ESG à l’aide des données. Les dirigeants du secteur des TI devront travailler en collaboration avec ceux du secteur ESG pour clarifier leur stratégie en matière d’opérations responsables et se concentrer sur des domaines dans lesquels les TI peuvent avoir des répercussions. En outre, les dirigeants du secteur ESG doivent aller au-delà de la réduction des émissions de carbone et s’intéresser à d’autres enjeux, par exemple l’économie circulaire, la gestion des droits de la personne et la réduction de la corruption dans les chaînes d’approvisionnement, ainsi que saisir leur valeur pour adopter un état d’esprit axé sur les enjeux ESG.

Pour faire la transition vers le XaaS et l’innovation à grande vitesse, les organisations canadiennes devront se concentrer davantage sur les données, en particulier alors qu’elles exploreront les possibilités de l’IA. Cela signifie que les dépenses de la fonction TI consacrées aux analyses de données deviendront beaucoup plus élevées au cours des années à venir, si bien qu’elle devra collaborer avec toutes les parties de l’entreprise pour la démocratisation des données.

Toutefois, 34 % des organisations canadiennes qui ont répondu à notre rapport mondial sur la technologie ont une stratégie de gestion des données qui manque de maturité. Dans l’ensemble, les résultats montrent que le Canada est nettement moins mature (4,6 %) que la moyenne mondiale (15,5 %) pour ce qui est de l’intégration de l’analyse de données dans la culture et les activités.

Il faut viser la démocratisation des données, mais pour ce faire, il faut disposer des capacités de gestion des données et de gouvernance nécessaire pour faire en sorte que les utilisateurs qui adopteront des technologies comme l’IA générative puissent avoir la conviction que leurs données sont dignes de confiance et fiables. Les directeurs des systèmes d’information devront collaborer avec les entreprises pour intégrer les données à la stratégie technologique élargie et créer un modèle d’opérations et une feuille de route de TI axées sur les données. Par contre, il faudra remédier à la pénurie de talents pour y parvenir.

34 % des organisations canadiennes ont une stratégie de gestion des données qui manque de maturité

Selon les prévisions, l’enjeu de la pénurie de talents ne peut que s’aggraver, à la fois au Canada et ailleurs dans le monde, en particulier sur le plan des compétences spécialisées en architecture et en ingénierie des données qui seront nécessaires dans un avenir de XaaS. Les compétences et les capacités nécessaires évoluant rapidement, la fonction TI devra s’assurer que les talents suivent le rythme des changements technologiques par l’apprentissage et le perfectionnement. Si les directeurs des systèmes d’information ne trouvent pas les ensembles de compétences spécialisées qu’ils recherchent, il est probable qu’ils se cachent au sein de l’organisation. Toutefois, il faudrait décrire les besoins pour les trouver.

Les organisations qui auront le plus de succès seront celles qui cultivent les talents, produisant ainsi les compétences dont elles ont besoin pour réussir, et qui élaborent une marque solide qui interpellera les jeunes candidats, notamment en adoptant des pratiques de diversité, d’équité et d’inclusion (DEI). Les directeurs des systèmes d’information devront réfléchir à la façon dont ils attirent et fidélisent les employés, ainsi qu’à la façon de remanier la structure des talents en TI. Des programmes de perfectionnement ou des changements de postes pourraient s’avérer nécessaires, ce qui exigera probablement une certaine gestion du changement.